Pourquoi certaines espèces deviennent-elles en péril

Au cours d'une longue histoire d'évolution, chaque espèce s'est adaptée à une niche écologique particulière. Quand les changements dépassent une certaine limite, certaines espèces cessent de prospérer, et leur nombre décroît jusqu'à ce qu'elles deviennent en péril.

Il y a de nombreuses raisons, souvent complexes et interdépendantes, qui causent le déclin de certaines espèces et qui les mettent en péril. De toute évidence, différentes forces extérieures (facteurs dans l'environnement d'une espèce) influencent sa capacité de survie. De plus, des forces internes, plus subtiles, telles que les exigences biologiques particulières d'une espèce et la capacité de celle-ci à s'adapter au changement, déterminent si l'espèce réussira à composer avec les changements externes dans son environnement, et à quel point.

Certains des plus fréquents facteurs environnementaux responsables du déclin des espèces sont décrits ci-dessous.

Perte et dégradation des habitats

Le facteur qui menace le plus les espèces aujourd'hui, c'est la perte et la dégradation des habitats. En effet, environ 60 p. 100 des espèces désignées en péril par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) sont touchées par des problèmes liés à l'habitat. Si une espèce n'arrive pas à trouver des conditions de vie convenables, elle ne survivra tout simplement pas.

À mesure que la population humaine croît, les développements augmentent et s'étendent dans le paysage pour satisfaire les désirs et les besoins des humains. La construction de maisons, d'édifices et de routes, l'exploitation forestière de vastes périmètres de forêts pour la production de papier et de matériaux de construction, l'exploitation minière et la conversion des habitats sauvages en terres agricoles productives, toutes ces activités causent la réduction des habitats d'espèces sauvages; et quand les habitats rapetissent, les espèces en sont évincées.

Il n'est pas nécessaire qu'un habitat soit complètement détruit pour n'être plus convenable à certaines espèces. La seule présence humaine, avec le dérangement qu'elle engendre, peut pousser certaines espèces à abandonner leur habitat ou compromettre leur reproduction. La présence humaine affecte les espèces de bien d'autres façons. Les véhicules sur les routes sont particulièrement dangereux pour certains serpents et couleuvres qui aiment se chauffer au soleil sur la chaussée et pour certains oiseaux qui viennent se nourrir près des routes. Il a été démontré que l'éclairage provenant des voitures, des lampadaires et des édifices ont de sérieuses répercussions sur les populations de papillons de nuit. La régulation du débit des eaux dans les rivières, généralement pour la production d'électricité, modifie les conditions en aval, rendant souvent ces masses d'eau inutilisables pour certaines espèces ou réduisant les possibilités de celles-ci de se rendre dans des endroits du système dont elles ont besoin pour se nourrir ou se reproduire. La construction de barrages ou le labourage près des rivières et des ruisseaux causent l'envasement et augmentent la turbidité de l'eau, facteurs responsables du déclin de certaines populations de poissons et de mollusques.

Isolement génétique et reproductif

Quand les habitats sont détruits ou dégradés, l'aire de répartition d'une espèce s'en trouve fragmentée. Alors que les parcelles de l'habitat nécessaire deviennent plus petites et que les obstacles entre ces îlots augmentent, les populations restantes sont de plus en plus isolées. C'est donc dire que les individus ont de moins en moins de partenaires reproducteurs et que les échanges et les croisements génétiques n'ont plus lieu. Plus la variabilité génétique d'une population est limitée, moins cette population réussit à composer avec les changements, la maladie ou d'autres facteurs, et à survivre à long terme.

Le cas du chicot févier illustre bien le problème de l'isolement génétique qui résulte de la fragmentation des habitats. La plupart des arbres qui restent produisent des clones unisexués, mais ils sont tellement éloignés entre eux que le pollen ne se rend plus de l'un à l'autre. Donc même si les arbres fleurissent, ils ne produisent pas de graines. Sans aide, une grande partie de la population canadienne de chicot févier continuera d'exister seulement le temps que les individus actuels pourront continuer leur reproduction végétative.

Suppression des événements naturels

Les activités qui endommagent directement l'habitat ne sont pas les seules qui soient importantes. Parfois, c'est l'empêchement des événements naturels par les humains qui cause du tort. La lutte aux feux de forêts, par exemple, a permis aux espèces ligneuses d'envahir les aires ouvertes, enlevant ainsi la lumière aux espèces qui auraient besoin d'habitats plus ouverts. La régulation du débit des eaux des rivières a fait cesser les crues régulières du printemps, empêchant ainsi le remplissage des étangs adjacents. Il en est résulté une altération du régime d'humidité, et donc des habitats, rendant ceux-ci non convenables à certaines espèces.

Contamination environnementale

Aujourd'hui, de nombreuses espèces sont exposées aux contaminants environnementaux qui constituent probablement le deuxième facteur en importance (après la perte et la dégradation des habitats) qui menace les espèces. Le DDT, le fénitrothion (qui était pulvérisé sur les forêts pour contrôler la tordeuse des bourgeons de l'épinette) et le Carbofurane (utilisé pour le contrôle des sauterelles) sont quelques-uns des produits chimiques qui nuisent beaucoup aux espèces sauvages. De plus, de nombreux produits chimiques sont relâchés par les industries dans l'air ou dans l'eau, ou encore sont lessivés des terres forestières ou agricoles dans les masses d'eau; ils peuvent nuire à toute une variété d'organismes. Les pluies acides aussi ont fait leur part de dommages.

Les produits chimiques relâchés dans l'environnement peuvent avoir des effets indirects. De récentes études démontrent que l'épuisement de la couche d'ozone, causé par des produits chimiques relâchés dans l'atmosphère, peut avoir de graves effets nocifs sur les espèces sauvages. Par exemple, on croit que l'épuisement de la couche d'ozone est responsable de la réduction de la survie des œufs des amphibiens avant leur éclosion.

Surexploitation et commerce abusif

Au début du vingtième siècle, les prises excessives d'espèces sauvages (plantes et animaux), entre autres pour la nourriture et la fourrure, constituaient la principale menace pour les espèces sauvages. C'est ainsi que des espèces comme la tourte voyageuse et le Grand Pingouin sont disparues et que le nombre de courlis esquimaux a diminué à un point tel que l'espèce n'a jamais pu se rétablir. Encore aujourd'hui, des espèces comme la baleine noire, la loutre de mer, l'omble Aurora et le ginseng à cinq folioles font l'objet de prises et de récoltes excessives ou subissent encore les conséquences d'une surexploitation antérieure.

Le commerce abusif menace également plusieurs espèces. Outre la nourriture et la fourrure, ces espèces sont prises dans la nature et commercialisées pour leurs propriétés médicinales, comme trophée de chasse, comme plante ornementale ou encore comme animal de compagnie. Parmi les espèces canadiennes convoitées, on retrouve entre autres le faucon pèlerin, l'hydraste du Canada, les orchidées, les esturgeons et les ours. La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) contrôle ce commerce au Canada et dans le Monde.

Changement climatique

Les changements climatiques, qu'ils soient des événements naturels cycliques ou de lents changements climatiques causés par les activités humaines, touchent les espèces d'une façon insidieuse dont il est difficile d'évaluer l'importance.

Des événements climatiques soudains, comme de violents orages, font aussi leurs lots de victimes. Par exemple, la croûte de glace qui a couvert une grande partie de la toundra de l'Arctique canadien pendant plusieurs hivers a empêché les caribous de Peary de creuser la neige pour atteindre leur nourriture. Jusqu'à présent, les populations ne se sont pas rétablies de la famine et des mortalités massives qu'elles ont subies.

Maladies

L'éclosion de maladies peut décimer des populations. Dans des circonstances normales, les effets sont limités parce qu'ils touchent des zones plutôt restreintes. Cependant, lorsque tous les individus d'une espèce sont confinés dans un petit restant d'aire de répartition, la maladie peut avoir un effet dévastateur sur toute la population, donc sur la survie de l'espèce.

Espèces envahissantes

L'introduction de plantes ou d'animaux envahissants par des humains a aussi causé des ravages parmi les espèces indigènes. Rapidement, ce facteur est en train de devenir une importante cause de déclin de certaines espèces. Les Moineaux domestiques et les Étourneaux sansonnets sont au moins partiellement responsables du déclin des populations de merles-bleus. Les moules zébrées sont responsables du déclin rapide de nombreuses moules et palourdes indigènes. Le genêt à balai envahit actuellement les habitats indigènes sur l'île de Vancouver et il étouffe les plantes herbacées indigènes qui comportent des espèces rares. Le mûrier blanc, un intrus, est en train de s'hybrider avec notre mûrier rouge et risque ainsi de causer la perte de l'espèce indigène par domination génétique.

Il y a un grand nombre de facteurs qui ont une incidence sur les espèces. Dans beaucoup de cas, il est impossible de trouver une seule raison pour expliquer le déclin d'une espèce. Il s'agit souvent d'une accumulation sournoise d'effets de plusieurs facteurs qui mettent ces espèces en péril.

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