Programme de rétablissement du polygale incarnat (Polygala incarnata) au Canada [proposition] – 2012

Loi sur les espèces en péril
Série de Programmes de rétablissement

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Programme de rétablissement du polygale incarnat (Polygala incarnata) au Canada [PROPOSITION] – 2012

Couverture de la publication : Programme de rétablissement du polygale incarnat (Polygala incarnata) au Canada [PROPOSITION] – 2012.

Polygale incarnat

Photo : Polygale incarnat

Référence recommandée :

Environnement Canada. 2012. Programme de rétablissement du polygale incarnat (Polygala incarnata) au Canada [Proposition], Série de Plans de gestion de la Loi sur les espèces en péril, Environnement Canada, Ottawa, v + 19 p.

Pour télécharger le présent programme de rétablissement ou pour obtenir un complément d’information sur les espèces en péril, incluant les rapports de situation du COSEPAC, les descriptions de la résidence, les plans d’action et d’autres documents connexes sur le rétablissement, veuillez consulter le Registre public des espèces en péril.

Illustration de la couverture : © Gary Allen

Also available in English under the title
“Recovery Strategy for the Pink Milkwort (Polygala incarnata) in Canada [Proposed]”

© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre de l’Environnement, 2012. Tous droits réservés.
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Le contenu du présent document (à l’exception des illustrations) peut être utilisé sans permission, mais en prenant soin d’indiquer la source.


En vertu de l’Accord pour la protection des espèces en péril (1996), les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux signataires ont convenu d’établir une législation et des programmes complémentaires qui assureront la protection efficace des espèces en péril partout au Canada. En vertu de la Loi sur les espèces en péril (L.C. 2002, ch. 29) (LEP), les ministres fédéraux compétents sont responsables de l’élaboration des programmes de rétablissement pour les espèces inscrites comme étant disparues du pays, en voie de disparition ou menacées et sont tenus de rendre compte des progrès réalisés d’ici cinq ans.

Le ministre de l’Environnement est le ministre compétent pour le rétablissement du polygale incarnat et a élaboré le présent programme, conformément à l’article 37 de la LEP. Ce programme a été préparé en collaboration avec le ministère des Richesses naturelles de l’Ontario.

La réussite du rétablissement de l’espèce dépendra de l’engagement et de la collaboration d’un grand nombre de parties concernées qui participeront à la mise en œuvre des recommandations formulées dans le présent programme. Cette réussite ne pourra reposer seulement sur Environnement Canada ou sur toute autre compétence. Tous les Canadiens et toutes les Canadiennes sont invités à appuyer le programme et à contribuer à sa mise en œuvre pour le bien du polygale incarnat et de l’ensemble de la société canadienne.

Le présent programme de rétablissement sera suivi d’un ou de plusieurs plans d’action qui présenteront de l’information sur les mesures de rétablissement qui doivent être prises par Environnement Canada et d’autres compétences et/ou organisations participant à la conservation de l’espèce. La mise en œuvre du présent programme est assujettie aux crédits, aux priorités et aux contraintes budgétaires des compétences et organisations participantes.

Les ébauches antérieures du présent programme de rétablissement ont été rédigées par Jane Bowles, à titre d’addenda à l’ébauche du programme de rétablissement des écosystèmes de l’île Walpole (Draft Walpole Island Ecosystem Recovery Strategy, Bowles, 2005), en collaboration avec l’Équipe de rétablissement de l’île Walpole, la Première nation de Walpole Island et Environnement Canada. Les membres de l’Équipe de rétablissement de l’île Walpole sont notamment : Dean Jacobs (Première nation de Walpole Island), Madeline Austen (Environnement Canada, Service canadien de la faune – Ontario), Michael Williams (Centre du patrimoine de Walpole Island (Walpole Island Heritage Centre)), Robert Wenting (Environnement Canada, Service canadien de la faune), D. Roy Isaac (Centre du patrimoine de Walpole Island), Roger Williams (conseil de bande de Walpole Island), Eric Isaac (aîné de la collectivité de Walpole Island), Deborah Metsger (Musée royal de l’Ontario), Janice Metcalf-Smith (Environnement Canada, Institut national de recherche sur les eaux), Clint Jacobs (Walpole Island Heritage Centre), David W. White (Centre du patrimoine de Walpole Island), Allen Woodliffe (ministère des Richesses naturelles de l’Ontario) et Jane Bowles, auteure de la première ébauche du présent programme.

Angela McConnell, Kathy St. Laurent, Christina Rohe, Madeline Austen, Lesley Dunn, Angela Darwin et Marie-Claude Archambault (Environnement Canada, Service canadien de la faune – Ontario), Clint Jacobs et Jared Macbeth (Centre du patrimoine de Walpole Island) et de nombreuses autres personnes ont examiné le présent document au cours de son élaboration et ont fourni des observations et des conseils.

Le polygale incarnat (Polygala incarnata) figure sur la liste des espèces en voie de disparition de l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril (LEP) du gouvernement fédéral. Cette plante herbacée annuelle grêle pousse en milieu ouvert humide-mésique à mésique à l’intérieur de prairies à herbes hautes. En Amérique du Nord, la majeure partie de l’aire de répartition de l’espèce se trouve dans le Midwest ainsi que dans le sud-est, le long de la côte de l’Atlantique. Au Canada, le polygale incarnat se rencontre actuellement dans deux secteurs du sud-ouest de l’Ontario : sur les terres de la Première nation de Walpole Island, dans le delta de la rivière Sainte-Claire, et dans la réserve naturelle provinciale Ojibway Prairie, près de Windsor (COSEPAC, 2009).

Les menaces auxquelles sont exposées les populations canadiennes de polygale incarnat sont, entre autres : la perte ou la dégradation de l’habitat, les changements dans la dynamique écologique ou les processus naturels, les espèces envahissantes, la perturbation causée par les activités récréatives, la sécheresse et le broutage par les animaux sauvages.

Conformément au principe de précaution, même si le caractère réalisable du rétablissement comporte des inconnues, un programme de rétablissement complet a été préparé, tel qu’il convient de faire lorsque le rétablissement est déterminé comme étant réalisable. L’objectif en matière de population et de répartition est de maintenir, ou d’accroître là où c’est biologiquement et techniquement possible, l’effectif actuel du polygale incarnat et de maintenir la répartition actuelle des quatre populations canadiennes. Les stratégies générales à préconiser contre les menaces pesant surla survie et le rétablissement de l’espèce sont exposées dans la section 6.2, qui porte sur l'orientation stratégique du rétablissement.

L’habitat essentiel du polygale incarnat est désigné de façon partielle dans le présent programme de rétablissement, il a été désigné dans la réserve naturelle provinciale Ojibway Prairie, près de Windsor, en Ontario. Une fois que l’information requise sera obtenue, de l’habitat essentiel additionnel sera désigné et pourra être décrit dans un plan d’action visant plusieurs espèces en péril élaboré pour le territoire visé en collaboration avec la Première nation de Walpole Island.

Un ou plusieurs plans d’action de ce genre seront terminés pour l’espèce d’ici décembre 2016.

D’après les quatre critères suivants présentés par le Gouvernement du Canada (2009), le caractère réalisable du rétablissement du polygale incarnat comporte des inconnues. Aussi, conformément au principe de précaution, le présent programme de rétablissement a été élaboré, tel qu’il convient de faire lorsque le rétablissement est déterminé comme étant réalisable. Le présent programme de rétablissement traite des inconnues entourant le caractère réalisable du rétablissement.

  1. Des individus de l’espèce sauvage capables de se reproduire sont disponibles maintenant ou le seront dans un avenir prévisible pour maintenir la population ou augmenter son abondance.

    Oui. Il y a des individus capables de se reproduire dans l’aire de répartition canadienne de l’espèce. Il en existe également aux États-Unis, mais il reste à déterminer si ces populations sont génétiquement semblables aux populations canadiennes et si elles peuvent servir à maintenir la population canadienne ou à en accroître l’effectif.

  2. De l’habitat convenable suffisant est disponible pour soutenir l’espèce, ou pourrait être rendu disponible par des activités de gestion ou de remise en état de l’habitat.

    Oui. Une superficie suffisante d’habitat convenable est actuellement disponible pour soutenir la population canadienne.

  3. Les principales menaces pesant sur l’espèce ou son habitat (y compris les menaces à l’extérieur du Canada) peuvent être évitées ou atténuées.

    Inconnu. Il existe des mesures de rétablissement permettant d’éviter ou d’atténuer certaines menaces, comme la perte ou la dégradation de l’habitat, les changements dans les processus naturels et la perturbation causée par les activités récréatives. Cependant, il reste à déterminer si certaines menaces importantes, comme l’impact des espèces envahissantes, peuvent être suffisamment atténuées pour garantir la survie à long terme de l’espèce au Canada.

  4. Des techniques de rétablissement existent pour atteindre les objectifs en matière de population et de répartition ou leur élaboration peut être prévue dans un délai raisonnable.

    Oui. Au Canada, la principale menace à laquelle est exposé le polygale incarnat est la perte de son habitat spécialisé, soit la prairie à herbes hautes (COSEPAC, 2009). Certaines superficies occupées par l’espèce ont été sauvegardées au moyen de projets d’acquisition. De plus, grâce aux efforts du Centre du patrimoine de Walpole Island, le rythme de transformation de l’habitat a été réduit dans les terres de cette Première nation (Bowles, 2005). Il existe des techniques de rétablissement (faisant appel au brûlage dirigé) qui permettraient de réduire l’empiètement des espèces ligneuses et de maîtriser certaines espèces envahissantes. Il conviendrait d’étudier plus à fond les techniques de rétablissement qui permettraient de réduire à long terme l’impact et la propagation des espèces envahissantes. Les essais de germination ex situ de graines de polygale incarnat n’ont pas été couronnés de succès (Bake and Bowles, 2007).

Date de l’évaluation : Novembre 2009

Nom commun (population) : Polygale incarnat

Nom scientifique : Polygala incarnata

Statut selon le COSEPAC : Espèce en voie de disparition

Justification de la désignation : Cette herbacée annuelle est très restreinte géographiquement et est présente dans les habitats de prairie à herbes hautes dans le sud-ouest de l’Ontario. Il y a probablement quatre populations totalisant environ 1 800 plants, dont la plupart se trouve dans une population. Toutes les populations sont menacées par l’empiètement de plantes ligneuses attribuable à la suppression des incendies et par des espèces envahissantes. La conversion de l’habitat en terres agricoles, le développement résidentiel, le fauchage, le piétinement ainsi que l’altération du drainage et du régime d’humidité menacent trois populations.

Répartition au Canada : Ontario

Historique du statut : Espèce désignée en voie de disparition en avril 1984. Réexamen et confirmation du statut d’espèce en voie de disparition en avril 1998, en mai 2000 et en novembre 2009.

* COSEPAC – Comité sur la situation des espèces en péril au Canada

À l’échelle mondiale, le polygale incarnat (Polygala incarnata) est jugé « non en péril »[1] (cote G5). Aux États-Unis, l’espèce se rencontre depuis le Delaware jusqu’en Floride dans l’est, et, dans l’ouest, depuis le Wisconsin et l’Iowa en descendant vers le sud jusqu’au Texas; à l’échelle du pays, le polygale incarnat est considéré comme « non classé »[2] (cote NNR) (NatureServe, 2009, Annexe B). Au Canada, le polygale incarnat (Polygala incarnata) se rencontre uniquement dans la province de l’Ontario; la cote de conservation nationale et infranationale de cette espèce est « gravement en péril »[3] (cotes N1 et S1, respectivement) (NatureServe, 2009).

Le polygale incarnat figure à titre d’espèce en voie de disparition[4] dans l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril (LEP) fédérale. En Ontario, le polygale incarnat est une espèce en voie de disparition[5] aux termes de la Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition provinciale.

On estime que moins de 1 % de l’aire de répartition mondiale du polygale incarnat se trouve au Canada. L’aire de répartition canadienne est très limitée et se trouve à la limite nord de l’aire de répartition nord-américaine.

Le polygale incarnat est une plante herbacée annuelle à tige simple, lisse, pruineuse[6], mince, non ramifiée ou peu ramifiée. Les fleurs sont violet-rose, tubuleuses, réunies en une grappe[7] (COSEPAC, 2009; Environnement Canada, 2010). Les feuilles sont alternes, peu nombreuses, linéaires, ascendantes; elles mesurent environ 5 à 12 mm de longueur et tombent généralement avant la floraison. La croissance est indéterminée et la plante atteint à maturité une hauteur de 20 à 40 cm. Les fleurs ouvrent et les fruits mûrissent à tour de rôle, depuis la base vers le sommet de chaque inflorescence, de manière continue de juillet à octobre. Le fruit est une capsule verte comportant deux loges. Les graines sont noires, pubescentes, longues d’environ 2 mm, et sont munies d’un petit appendice rempli d’air (Bake et Bowles, 2007).

En Amérique du Nord, c’est dans les plaines centrales et dans les États côtiers du sud-est des États-Unis que le polygale incarnat est le plus commun (figure 1). Au Canada, quatre populations pourraient encore exister, toutes en Ontario : trois des populations sont situées dans les terres de la Première nation de Walpole Island, dans le delta de la rivière Sainte-Claire, tandis que la quatrième se trouve dans la réserve naturelle provinciale Ojibway Prairie, près de Windsor (figure 2). Des mentions historiques remontant au 19e siècle indiquent que le polygale incarnat a déjà été présent à Leamington, en Ontario, ainsi qu’au bord de la rivière Niagara, près des chutes du même nom; cependant, aucun spécimen permettant de confirmer ces mentions n’existe, ou n’a pu être trouvé, et aucune population n’a été repérée dans ces secteurs (COSEPAC, 2009). Deux autres populations se trouvaient autrefois à l’île Squirrel, dans le delta de la rivière Sainte-Claire; elles ont été observées pour la dernière fois en 1987 et en 1996, respectivement, et il est présumé qu’elles sont aujourd’hui disparues (Brownell, 1998).

En 2008, l’effectif total des trois populations de la Première nation de Walpole Island a été estimé à 1 800 individus (COSEPAC, 2009). La plus grande des trois populations comptait alors environ 1 700 individus, ce qui représente 95 % de l’effectif total de l’espèce au Canada (COSEPAC, 2009). Depuis 2003, année où a commencé le suivi périodique de cette population, son effectif varie entre 1 600 et 2 250 individus (COSEPAC, 2009). La deuxième population de la Première nation de Walpole Island comptait 87 individus au moment du dernier relevé, effectué en 2006, et elle en avait compté 69 en 2003. La troisième population de la Première nation de Walpole Island comptait 9 individus au moment du relevé de 2006. Le site a été visité en 2008, mais il avait été fauché, et aucun individu n’a été aperçu. Cette population n’est pas encore officiellement déclarée disparue, et nous la considérerons comme une population existante jusqu’à ce que sa situation soit confirmée. Par ailleurs, le relevé réalisé en 2008 dans la réserve naturelle provinciale Ojibway Prairie a permis d’y dénombrer 9 individus de polygale incarnat (COSEPAC, 2009). Depuis la découverte de cette population, en 1994, son effectif varie entre 9 et 28 individus.

Comme il s’agit d’une espèce annuelle, il est normal que son effectif fluctue d’une année à l’autre. Pour pouvoir cerner les tendances réelles des populations, il faut plusieurs années de suivi annuel. Donc, en l’absence de relevés détaillés et de suivi à long terme, les tendances démographiques du polygale incarnat demeurent inconnues. De plus, lorsque la plante n’est pas en fleurs, il est difficile de la repérer parmi les grandes graminées de la prairie.

Figure 1. Répartition du polygale incarnat en Amérique du Nord (Carte établie, avec modifications, d’après Argus et al., 1982-1987)

La figure 1 est une carte de la répartition du polygale incarnat en Amérique du Nord. L'espèce se trouve principalement dans les plaines centrales et dans les États côtiers du sud-est; une très petite portion de l'aire de répartition s'étend à l'extrémité sud de l'Ontario.

Figure 2. Répartition canadienne du polygale incarnat (Environnement Canada, 2010)

La figure 2 montre la répartition du polygale incarnat au Canada. L'espèce se trouve seulement dans la province de l'Ontario, où elle compte trois populations réparties dans les terres de la Première nation de Walpole Island, dans le delta de la rivière Sainte-Claire, et une population vivant dans la réserve naturelle provinciale Ojibway Prairie, près de Windsor.

Au Canada, le polygale incarnat pousse le plus souvent dans des prairies humides-mésiques à mésiques dont le sol est un loam sableux où le drainage varie de modéré à imparfait. L’espèce a déjà été observée dans le substrat sableux d’un terrain dont la couche arable avait été enlevée (Canne-Hilliker, 1988). Les espèces végétales communément associées au polygale incarnat sont le schizachyrium à balais (Schizachyrium scoparium), la sclérie à trois glomérules (Scleria triglomerata), la comandre à ombelle (Comandra umbellata), le zizia doré (Zizia aurea), la véronique de Virginie (Veronicastrum virginicum), les antennaires (Antennaria spp.), le panic raide (Panicum virgatum), le panic à touffe dense (Panicum implicatum), le pycnanthème de Virginie (Pycnanthemum virginianum), le faux-sorgho penché (Sorghastrum nutans) et le liatris à épi (Liatris spicata) (Bake et Bowles, 2007). Brownell (1984) a signalé que le schizachyrium à balais est toujours associé au polygale incarnat.

Les incendies périodiques sont essentiels au maintien des conditions de prairie ouverte. Il se peut que la présence successive d’une nappe phréatique près de la surface du sol au printemps et d’une sécheresse en été contribue également au maintien d’un habitat de prairie ouverte (COSEPAC, 2009).

Le polygale incarnat se reproduit par voie sexuée, mais l’identité du ou des principaux pollinisateurs n’est pas connue. Les fleurs sont hermaphrodites, mais il y a peu d’information à savoir si la fécondation se fait par autopollinisation ou par pollinisation croisée (Brownell, 1984). En 2006, un petit nombre d’inflorescences recouvertes d’un sac ont quand même produit des graines (Bake et Bowles, 2007), ce qui montre que l’autopollinisation est possible. Les graines sont probablement dispersées par les fourmis (Bake et Bowles, 2007); le vent a également été suggéré comme facteur potentiel de dispersion, mais il est peu probable que ce soit sur une grande distance. Les graines pourraient aussi être dispersées par l’eau, sur de courtes distances, lorsque de grosses pluies estivales provoquent une inondation temporaire du sol (COSEPAC, 2009). La répartition des populations existantes semble indiquer que la dispersion à grande distance est extrêmement rare (COSEPAC, 2009).

Comme le polygale incarnat est une plante annuelle, la population d’individus matures apparaissant chaque année dépend de la quantité de graines présentes, de leur taux de germination et des conditions climatiques influant sur la croissance de la plante. Il n’existe aucune donnée sur les taux de germination et de viabilité des graines et sur la longévité du réservoir de semences du sol. En 2007, les essais de germination en laboratoire n’ont pas été couronnés de succès (Bake et Bowles, 2007).

Tableau 1. Tableau d’évaluation des menaces – polygale incarnat
Menace Niveau de préoccupation1 Étendue Occurrence Fréquence Gravité2 Certitude causale3
* Perte ou dégradation de l’habitat
Expansion de l’agriculture Élevé Généralisée Historique et courante Récurrente Élevée Élevée
Aménagement paysager (p. ex. fauchage) Élevé Localisée Courante Saisonnière Élevée Élevée
Agrandissement de la décharge et dépôt d’ordures Élevé Localisée Courante et prévue Récurrente Élevée Moyenne
Construction résidentielle Moyen Localisée Historique et courante Récurrente Élevée Moyenne
* Changements dans la dynamique écologique ou les processus naturels
Modification du régime d’incendie Élevé Généralisée Courante Saisonnière Élevée Élevée
Modification du régime hydrologique Moyen Localisée Historique et prévue Récurrente Modérée Élevée
* Espèces ou génomes exotiques, envahissants ou introduits
Roseau commun (Phragmites australis ssp. australis) Élevé Généralisée Courante Saisonnière Modérée Moyenne
Mélilot blanc (Melilotus alba) Élevé Généralisée Courante Saisonnière Modérée Moyenne
Chardon des champs (Cirsium arvense) Élevé Localisée Courante Saisonnière Modérée Moyenne
Robinier faux-acacia (Robinia pseudoacacia) Élevé Localisée Courante Saisonnière Modérée Moyenne
* Perturbation ou dommages
Dommages accessoires causés par les activités récréatives (p. ex. VTT , piétinement) Moyen Localisée Courante Continue Modérée Moyenne
* Conditions climatiques et catastrophes naturelles
Sécheresse Faible** Généralisée Prévue Récurrente Élevée Faible
* Processus naturels ou activités
Broutage par les animaux sauvages Faible** Généralisée Courante Saisonnière Inconnue Faible
Dommages causés par les insectes Faible** Généralisée Courante Saisonnière Inconnue Faible

1 Niveau de préoccupation : signifie que la gestion de la menace représente une préoccupation (élevée, moyenne ou faible) pour le rétablissement de l’espèce, conforme aux objectifs en matière de population et de répartition. Ce critère tient compte de l’évaluation de toute l’information figurant dans le tableau.

2 Gravité : indique l’effet à l’échelle de la population (élevée : très grand effet à l’échelle de la population; modérée; faible; inconnue).

3 Certitude causale : indique le degré de preuve connu de la menace (élevée : la preuve disponible établit un lien fort entre la menace et les pressions sur la viabilité de la population; moyenne : il existe une corrélation entre la menace et la viabilité de la population, p. ex. une opinion d’expert; faible : la menace est présumée ou plausible).

* Les catégories de menaces sont classées de la plus préoccupante à la moins préoccupante.

** Les menaces affichant un faible niveau de préoccupation sont mentionnées et décrites, mais il est possible qu’elles ne soient pas abordées en détail dans les approches de rétablissement.

La perte ou la dégradation de l’habitat de prairie à herbes hautes est le principal facteur limitatif pour le polygale incarnat et continue de menacer à long terme la viabilité de l’espèce (COSEPAC, 2009).

Expansion de l’agriculture
La transformation de l’habitat pour les besoins de l’agriculture était historiquement et continue d’être une menace de première importance pour le polygale incarnat et son habitat; de nombreux secteurs de prairie à herbes hautes ont ainsi disparu des terres de la Première nation de Walpole Island (COSEPAC, 2009). En 1985, une population de polygale incarnat a perdu la plus grande partie de son effectif à cause de la transformation de son habitat en terres agricoles; en 2003, elle ne comptait plus qu’un seul individu (COSEPAC, 2009).

Aménagement paysager
Le fauchage régulier du terrain a provoqué la disparition d’une sous-population et pourrait avoir contribué au déclin d’une autre; de plus en plus de secteurs sont fauchés dans les terres de la Première nation de Walpole Island (COSEPAC, 2009). Un secteur de prairie entourant une décharge renfermait une petite population relique de polygale incarnat, et ce secteur a été fauché en 2008; par la suite, aucun individu de l’espèce n’a été retrouvé, et il se peut que l’endroit exact où se trouvait la population ait été fauché ou recouvert d’ordures (COSEPAC, 2009).

Agrandissement de la décharge et dépôt d’ordures
Une population de polygale incarnat se trouve près d’une décharge. L’agrandissement de cette décharge et le dépôt d’ordures directement sur le site occupé par le polygale incarnat pourraient menacer cette population ou avoir déjà contribué à sa disparition (COSEPAC, 2009).

Modification du régime d’incendie
Le polygale incarnat a besoin de conditions de prairie ouverte (COSEPAC, 2009). La suppression des incendies peut donc limiter l’habitat convenable en permettant aux arbres et arbustes de pousser et, ultimement, d’éliminer l’espèce en lui faisant de l’ombre. Dans les terres de la Première nation de Walpole Island, les incendies sont de moins en moins fréquents, principalement à cause des pressions exercées pour lutter contre les incendies afin de protéger les habitations et les autres aménagements; de nombreux habitats de prairie sont ainsi en train de se transformer en savane et en milieu boisé (COSEPAC, 2009). L’interprétation de photos aériennes prises de 1972 à 1998 a permis d’estimer que la superficie de prairie de l’île Walpole est passée de 730 à 470 ha environ, ce qui représente une perte de 36 % (Crow et al., 2003). Une partie de cette perte est due à l’expansion agricole et à la construction résidentielle, mais la plus grande partie a été causée par l’empiètement de la forêt et d’autres milieux boisés, en l’absence d’incendies réguliers (Crow et al., 2003). Inversement, les incendies survenant pendant les saisons inappropriées (c.-à-d. en automne) peuvent nuire au polygale incarnat, car sa floraison est tardive (COSEPAC, 2009).

Roseau commun, mélilot blanc, chardon des champs et robinier faux-acacia
Certaines espèces envahissantes sont en train d’envahir de nombreux habitats de prairie et contribuent ainsi à réduire la qualité de l’habitat du polygale incarnat dans les terres de la Première nation de Walpole Island (Bowles, 2005). Dans de nombreux sites occupés par l’espèce, la sous-espèce européenne du roseau commun, le mélilot blanc et le chardon des champs sont de plus en plus abondants (COSEPAC, 2009). Le robinier faux-acacia empiète sur l’habitat du polygale incarnat dans la réserve naturelle provinciale Ojibway Prairie; cette espèce tolérante au feu peut constituer une grave menace si elle n’est pas maîtrisée (COSEPAC, 2009). Les espèces envahissantes peuvent avoir divers impacts : l’exclusion par compétition, le déplacement de la niche écologique, l’hybridation (Mooney et Cleland, 2001), et même la modification du régime d’incendie (Brooks et al., 2004). En l’absence de protocoles de gestion permettant de cibler et de maîtriser les espèces envahissantes, les conditions de l’habitat risquent de se dégrader au point de ne plus pouvoir servir d’habitat au polygale incarnat.

Construction résidentielle
La perte ou la dégradation de l’habitat associée à la construction résidentielle pourrait menacer les populations existantes de polygale incarnat ou même avoir fait disparaître des populations locales (COSEPAC, 2009). Sur les terres de la Première nation de Walpole Island, la construction résidentielle s’est accrue pour répondre à une grave pénurie de logements; la construction de ces maisons et l’aménagement du terrain les entourant ont entraîné l’élimination d’habitat convenable pour le polygale incarnat (COSEPAC, 2009).

Modification du régime hydrologique
Les changements naturels du niveau des lacs ainsi que les travaux de dragage et de creusage de fossés, pour la construction et l’entretien des routes, entre autres, peuvent nuire à l’habitat du polygale incarnat en modifiant son régime d’humidité (COSEPAC, 2009). Le haut niveau des eaux observé dans les années 1980 a peut-être contribué au déclin du polygale incarnat (COSEPAC, 2009).

Dommages accessoires causés par les activités récréatives
La circulation de piétons et de véhicules tout-terrain (VTT ) sur les sentiers peut endommager les plantes de manière directe par piétinement, ou de manière indirecte lorsque le sol est compacté au point de ne plus constituer un habitat convenable pour l’espèce. Le piétinement, particulièrement par les VTT , est en augmentation sur les terres de la Première nation de Walpole Island, où au moins un des sites se trouve sur une piste de VTT (COSEPAC, 2009).

Sécheresse
La majorité de l’habitat occupé par le polygale incarnat est humide à mouillé au début du printemps. Comme il s’agit d’une espèce annuelle, les périodes sèches survenant au printemps peuvent nuire au taux de germination des graines, réduisant ainsi le taux d’établissement des plantules et limitant le nombre de sites convenant à la germination. Les sécheresses de fin d’été, dans les secteurs ne présentant pas de nappe phréatique près de la surface du sol, peuvent provoquer la mort précoce des plantes et empêcher une bonne production de graines pour l’année suivante.

Broutage par les animaux sauvages
Le polygale incarnat subit un broutage, probablement par des mammifères tels que les lapins, qui grugent les inflorescences. Les plantes ainsi endommagées produisent généralement des rameaux à partir du nœud précédant immédiatement le dommage, ce qui leur permet de produire une nouvelle inflorescence (Bake et Bowles, 2007). Un taux élevé de broutage (88 %) a été observé dans le cadre d’une étude phénologique menée en 2006 (Bake et Bowles, 2007), mais les impacts du broutage sur la production de graines et la survie de la plante demeurent inconnus.

Dommages causés par les insectes
Les seuls insectes observés sur le polygale incarnat qui pourraient endommager cette plante sont les adultes et les juvéniles du Merocoris distinctus, petite punaise de la famille des Coréidés qui se rencontre souvent dans les fleurs. Les adultes et les juvéniles de cet insecte ont été observés parmi les fleurs du polygale incarnat, mais aucun dommage évident aux inflorescences n’a été constaté (COSEPAC, 2009).

L’objectif en matière de population et de répartition est de maintenir, ou d’accroître là où c’est biologiquement et techniquement réalisable, l’abondance actuelle du polygale incarnat et de maintenir la répartition actuelle des quatre populations existantes au Canada. La répartition canadienne du polygale incarnat est très limitée et se trouve à la limite nord de son aire de répartition nord-américaine. Récemment (vers 1985), l’espèce était plus abondante, mais il existe peu de possibilités de réintroduction dans les sites autrefois occupés, car la transformation à grande échelle de ces milieux pour d’autres usages (comme l’agriculture et la construction résidentielle) a éliminé l’habitat convenable. Il n’est probablement plus possible de restaurer la population et la répartition de l’espèce aux niveaux récents (vers 1985).

Depuis 2003, le Centre du patrimoine de Walpole Island effectue le suivi des populations de polygale incarnat présentes sur les terres de cette Première nation (COSEPAC, 2009). Le centre s’est efforcé d’y acquérir des terrains à des fins de conservation, ce qui a permis de réduire le taux de transformation des prairies en terres agricoles (COSEPAC, 2009). Dans la réserve naturelle provinciale Ojibway Prairie, la population de polygale incarnat fait l’objet d’un suivi régulier depuis qu’elle a été redécouverte, en 1994 (COSEPAC, 2009); au début de 2010, environ 65 % de la prairie a été soumise à un brûlage dirigé (Essex County Field Naturalists’ Club, 2010).

En 2006, un étudiant de l’Université de Western Ontario (University of Western Ontario), sous la direction de J. Bowles, Ph.D., a mené une étude visant à combler certaines lacunes dans les connaissances sur la biologie et l’écologie du polygale incarnat (Bake et Bowles, 2007).

Une des mesures de rétablissement décrites dans l’ébauche du programme de rétablissement des écosystèmes de l’île Walpole (Bowles, 2005) consistait à sensibiliser la collectivité aux espèces enpéril, y compris le polygale incarnat. Des brochures, des calendriers, des articles, des affiches et d’autres outils de promotion ont été distribués à cette fin aux gens de la Première nation de Walpole Island.

La Première nation de Walpole Island est en train d’élaborer un plan de protection des écosystèmes fondé sur les connaissances traditionnelles écologiques (CTE) de la collectivité.

Tableau 2. Tableau de planification du rétablissement – polygale incarnat
Menace ou élément limitatif Priorité Stratégie générale de rétablissement Description générale des approches de recherche et de gestion
Construction résidentielle, expansion de l’agriculture, agrandissement de la décharge et dépôt d’ordures, aménagement paysager, modification du régime d’incendie, modification du régime hydrologique, roseau commun, mélilot blanc, chardon des champs, robinier faux-acacia et dommages accessoires causés par les activités récréatives Élevée
  • Protection, conservation et gestion de l’habitat
• Promouvoir la conservation et la gestion adéquate des prairies servant d’habitat au polygale incarnat.
• Élaborer et utiliser des techniques de gestion de l’habitat (p. ex. brûlage dirigé, lutte contre les espèces envahissantes) permettant de maintenir un habitat convenable pour le polygale incarnat.
• Établir des politiques et/ou des ententes visant à protéger les habitats de prairie, particulièrement l’habitat existant du polygale incarnat (p. ex. acquisition de terrains ou accords de conservation).
• Effectuer le suivi des espèces envahissantes et aménager les sites en conséquence.
• Employer des techniques de restauration de l’habitat (p. ex. brûlage dirigé, lutte contre les espèces envahissantes) permettant d’accroître la superficie d’habitat convenable dans les emplacements existants, afin d’aider l’espèce à coloniser de nouveaux milieux et à augmenter son effectif, s’il y a lieu.
Toutes les menaces Élevée
  • Suivi et évaluation des populations
• Au moyen de relevés, déterminer l’effectif du polygale incarnat dans ses sites actuels et dans les sites où le statut de la population n’a pas encore été confirmé.
• Élaborer et mettre en œuvre un protocole de suivi à long terme.
Toutes les menaces Moyenne
  • Sensibilisation et éducation
• Sensibiliser la collectivité aux espèces en péril et à leur habitat, et l’encourager à participer au rétablissement.
• Favoriser le transfert des connaissances traditionnelles écologiques.
Manque de connaissances sur la reproduction et le recrutement, sur l’impact des menaces et sur les connaissances traditionnelles écologiques Moyenne
  • Recherche, cueillette de données et transfert de connaissances
• Exemples de domaines où il y a des lacunes dans les connaissances :
modes de dispersion, taux de germination et conditions de germination des graines; techniques de multiplication; identité du ou des principaux pollinisateurs; autres facteurs influant sur la taille des populations et le taux de recrutement (viabilité des graines, taille et longévité du réservoir de semences); impacts des espèces envahissantes, du broutage par les animaux et des dommages causés par les insectes; connaissances traditionnelles écologiques.

L’habitat essentiel du polygale incarnat au Canada est désigné de façon partielle dans le présent programme de rétablissement dans la mesure du possible et selon les données disponibles. Il est reconnu que l’habitat essentiel décrit ci-après ne suffit pas pour atteindre les objectifs en matière de population et de répartition de l’espèce. Le calendrier des études (section 7.2) décrit les activités requises pour la désignation de l’habitat essentiel additionnel nécessaire à l’atteinte des objectifs en matière de population et de répartition de l’espèce.

L’habitat essentiel du polygale incarnat est désigné comme étant l’étendue de l’habitat convenable contigu (section 7.1.1) existant à chaque site occupé (section 7.1.2).

Le polygale incarnat se rencontre en terrain ouvert, dans des prairies humides-mésiques à mésiques dont le sol est un loam sableux et où le drainage varie de modéré à imparfait. Brownell (1984) signale que l’espèce est toujours associée au schizachyrium à balais.

L’habitat convenable au polygale incarnat a été déterminé selon la classification écologique des terres (CET) de l’Ontario (Lee et al., 1998) et comprend la série de communautés végétales de la prairie ouverte à herbes hautes (Open Tallgrass Prairie [TPO]). Ce type de prairie se caractérise par une végétation basse dominée par des plantes graminoïdes de prairie, comme le schizachyrium à balais, un substrat minéral non consolidé, une couverture arborescente et arbustive égale ou inférieure à 25 %, une perturbation fréquente causée par les incendies et des variations extrêmes d’humidité d’une saison à l’autre (inondation printanière et sécheresse estivale) (Lee et al., 1998).

Le cadre de la CET fournit une approche normalisée de la détermination et de la délimitation des limites de l’écosystème dynamique. Il utilise les caractéristiques du milieu et de la végétation pour définir les communautés et permet ainsi d’établir les exigences écosystémiques biophysiques du polygale incarnat.

Le polygale incarnat est une espèce annuelle dont les populations peuvent connaître de fortes variations d’effectif d’une année à l’autre, en fonction de la présence de graines et des conditions permettant leur germination. Bien que le polygale incarnat peut n’occuper qu’une petite portion de l’habitat convenable, l’habitat convenable non occupé renferme probablement des portions du réservoir de semences et pourrait ainsi correspondre à la capacité de dispersion de la population. Pour cette raison, l’habitat convenable comprend à la fois l’habitat convenable occupé et l’habitat convenable contigu non occupé.

Si de nouvelles données révèlent que des populations sont présentes dans d’autres types d’habitat, la description de l’habitat convenable sera mise à jour de manière à inclure ces types d’habitat, et la désignation de l’habitat essentiel sera modifiée en conséquence.

Critère définissant l’occupation d’un site : On entend par « site occupé » tout site où le polygale incarnat été observé au cours d’au moins une des années entre 2001 et 2010.

Le polygale incarnat est une espèce annuelle, et ses populations fluctuent grandement d’une année à l’autre en raison de phénomènes de nature stochastique tels que les conditions météorologiques, la présence de pollinisateurs, l’humidité et les incendies récents (COSEPAC, 2009). Étant donné les menaces historiques et actuelles connues auxquelles est exposé ou a déjà été exposé le polygale incarnat (aménagement paysager, expansion de l’agriculture, construction résidentielle et modification du régime d’incendie) et les fluctuations annuelles que devraient connaître l’effectif et l’étendue de ses populations, les données antérieures à 2001 ne pourront servir à la désignation de l’habitat essentiel que s’il est possible de confirmer l’emplacement et l’étendue des populations de polygale incarnat visées par ces données. Il existe des observations montrant que certaines menaces ont pu influer sur des portions de la population vers la fin des années 1990. Certaines populations ont été réduites ou possiblement éliminées par l’aménagement paysager (fauchage), l’expansion continue de l’agriculture, la construction résidentielle et la modification du régime d’incendie, qui a permis à des espèces ligneuses et envahissantes d’empiéter sur l’habitat occupé par l’espèce (COSEPAC, 2009).

L’habitat essentiel du polygale incarnat est désigné comme étant l’étendue de la série de communautés végétales contiguës de la CET de prairie ouverte à herbes hautes (TPO) où le polygale incarnat a été observé au cours d’au moins une des années entre 2001 et 2010.

L’application des critères de l’habitat essentiel aux données disponibles a mené à la désignation de l’habitat essentiel dans la réserve naturelle provinciale Ojibway Prairie (annexe C, retirée de la version publique du présent programme). La détermination des sites répondant à ces critères a été effectuée à partir de la meilleure information disponible, dont les données compilées par le Centre d’information sur le patrimoine naturel de l’Ontario.

Environnement Canada ne dispose pas encore de l’information requise pour désigner l’habitat essentiel des trois autres populations. Bien que la présence continue du polygale incarnat ait été confirmée (voir par exemple COSEPAC, 2009), Environnement Canada n’a pas encore obtenu les données précises (emplacement et étendue des populations, caractéristiques biophysiques de l’habitat) requises pour répondre aux critères de l’habitat essentiel et permettant de désigner l’habitat essentiel. Il existe des preuves indiquant que certaines menaces ont pu avoir un impact sur des portions de la population au cours de la période écoulée depuis qu’Environnement Canada a obtenu des données en matière d’emplacement (avant 2001). De plus, il faut confirmer les caractéristiques, l’étendue et le nombre des communautés végétales de la CET de prairie ouverte à herbes hautes (TPO) associées aux trois populations. Une fois l’information adéquate obtenue (emplacement et étendue des populations, caractéristiques de l’habitat), de l’habitat essentiel additionnel sera désigné et pourrait être décrit dans le cadre d’un plan d’action visant plusieurs espèces en péril élaboré pour le territoire visé en collaboration avec la Première nation de Walpole Island.

L’annexe C indique les coordonnées des centroïdes de l’habitat essentiel du polygale incarnat; cette annexe a été retirée de la version publique du présent programme, afin de protéger l’espèce et son habitat. En effet, la divulgation de ces coordonnées entraînerait des risques considérables de piétinement accidentel par les visiteurs attirés par la rareté de la plante, en plus d’accroître le risque de cueillette.

Tableau 3. Calendrier des études visant à désigner l’habitat essentiel
Description de l’activité Justification Échéancier
Confirmer ou obtenir de l’information sur les trois populations existantes restantes dont l’habitat essentiel n’a pas encore été désigné. Confirmer l’emplacement et l’étendue des populations. 2011-2016
Effectuer la classification écologique du territoire pour les trois populations existantes restantes dont l’habitat essentiel n’a pas encore été désigné. Confirmer les associations d’habitat, les caractéristiques d’habitat et l’étendue de l’habitat convenable. 2011-2016
Désigner de l’habitat essentiel additionnel pour le polygale incarnat. Désigner l’habitat essentiel. 2016

La destruction est déterminée au cas par cas. La destruction est déterminée au cas par cas. On peut parler de destruction lorsqu’il y a dégradation d’une partie de l’habitat essentiel, soit de façon permanente ou temporaire, à un point tel que l’habitat essentiel n’est plus en mesure d’assurer ses fonctions lorsque exigé par l’espèce. La destruction peut découler d’une activité unique à un moment donné ou des effets cumulés d’une ou de plusieurs activités au fil du temps. (Gouvernement du Canada, 2009).

Les activités susceptibles d’entraîner la destruction de l’habitat essentiel du polygale incarnat comprennent, sans toutefois s’y limiter, les activités suivantes :

Les indicateurs de rendement présentés ci-dessous permettront de définir et de mesurer les progrès réalisés vers l’atteinte des objectifs en matière de population et de répartition.

Tous les cinq ans, le succès de la mise en œuvre du programme de rétablissement sera évalué par rapport aux indicateurs de rendement suivants :

Un ou plusieurs plans d’action seront élaborés pour le polygale incarnat d’ici décembre 2016. Chacun de ces plans devra faire appel à une approche plurispécifique axée sur le territoire visé et être élaboré en collaboration avec la Première nation de Walpole Island.

Argus, G.W., K.M. Pryer, D.J. White et C.J. Keddy (éd.) 1982-1987. Atlas des plantes vasculaires rares de l’Ontario, quatre parties, Musée national des sciences naturelles, Ottawa (Ontario), feuilles volantes.

Bake, A., et J.M. Bowles. 2007. Habitat and reproductive biology of Polygala incarnata, an endangered species in Canada, mémoire de baccalauréat inédit, University of Western Ontario, London (Ontario).

Bowles, J.M. 2005. Draft Walpole Island Ecosystem Recovery Strategy, Walpole Island Heritage Centre, Environnement Canadas et l’Équipe de rétablissement de l’île Walpole.

Brooks, M.L., C.M. D’Antonio, D.D. Richardson, J.B. Grace, J.E. Keeley, J.M. DiTomaso, R.J. Hobbs, M. Pellant et D. Dyke. 2004. Effects of invasive alien plants on fire regimes, BioScience 54 : 677-688.

Brownell, V.R. 1984. Status report on the pink milkwort Polygala incarnata in Canada,s Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada, Ottawa (Ontario), 35 pages.

Brownell, V.R. 1998 (sous presse). Rapport du COSEPAC sur la situation du polygale incarnat (Polygala incarnata) au Canada – Mise à jour, in Évaluation et Rapport de situation du COSEPAC sur le polygale incarnat (Polygala incarnata) au Canada, Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, Ottawa (Ontario), vi + 13 pages.

Canne-Hilliker, J. 1988. Status report on Gattinger’s agalinis Agalinis gattingeri in Canada, Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada, Ottawa (Ontario), 19 pages.

COSEPAC. 2009. Évaluation et Rapport de situation du COSEPAC sur le polygale incarnat (Polygala incarnata)au Canada, Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, Ottawa (Ontario), 25 pages.

Crow, C., J. Demelo, J. Hayes, J. Wells et T. Hundey. 2003. Walpole Island Land Use Change 1972-1998, rapport de classe inédit, Department of Geography, University of Western Ontario, London (Ontario).

Environnement Canada. 2010. Profil d’espèce, Polygale incarnat, Environnement Canada, Ottawa (Ontario). http://www.registrelep.gc.ca/species/speciesDetails_f.cfm?sid=186 [version anglaise consultée en octobre 2010].

Essex County Field Naturalists’ Club. 2010. The Egret: the newsletter of the Essex County Field Naturalists’ Club 20 (2) : juin 2010. 26 pages.

Gouvernement du Canada. 2009. Politiques de la Loi sur les espèces en péril, Cadre général de politiques [ébauche], Séries de politiques et de lignes directrices de la Loi sur les espèces en péril, Environnement Canada, Ottawa (Ontario), 42 pages.

Lee, H.T., W.D. Bakowsky, J. Riley, J. Bowles, M. Puddister, P. Uhlig et S. McMurray. 1998. Ecological land classification for southern Ontario: first approximation and its application, SCSS Field Guide FG-02, Ministère des Richesses naturelles de l’Ontario, Section des sciences de la région Centre-Sud, Direction du développement et du transfert des connaissances scientifiques, North Bay (Ontario).

Mooney, H. A., et E. E. Cleland. 2001. The evolutionary impact of invasive species, Proceedings from the National Academy of Sciences of the United States of America 98 : 5446-5451.

NatureServe. 2009. NatureServe Explorer: An online encyclopedia of life (en anglais seulement) [application Web], Version 4.6, NatureServe, Arlington (Virginie).

Une évaluation environnementale stratégique (EES) est effectuée pour tous les documents de planification du rétablissement en vertu de la LEP, conformément à La directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes. L’objet de l’EES est d’incorporer les considérations environnementales à l’élaboration des projets de politiques, de plans et de programmes publics pour appuyer une prise de décisions éclairée du point de vue de l’environnement.

La planification du rétablissement vise à favoriser les espèces en péril et la biodiversité en général. Il est cependant reconnu que des programmes peuvent, par inadvertance, produire des effets environnementaux qui dépassent les avantages prévus. Le processus de planification fondé sur des lignes directrices nationales tient directement compte de tous les effets environnementaux, notamment des incidences possibles sur des espèces ou des habitats non ciblés. Les résultats de l’EES sont directement inclus dans le programme lui-même, mais également résumés dans le présent énoncé, ci-dessous.

Le présent programme de rétablissement sera clairement favorable à l’environnement puisqu’il favorisera le rétablissement du polygale incarnat. Il profitera notamment aux espèces dont l’habitat est associé à la prairie à herbes hautes, dont certaines sont en péril, comme la platanthère blanchâtre de l’Est (Platanthera leucophaea), le liatris à épi (Liatris spicata), l’alétris farineux (Aletris farinosa), le cypripède blanc (Cypripedium candidum) et plusieurs autres. La possibilité que le programme produise par inadvertance des effets négatifs sur d’autres espèces a été envisagée. Certaines pratiques de gestion, comme le brûlage dirigé et l’application d’herbicides contre les espèces envahissantes, pourraient effectivement avoir des effets néfastes pour certaines espèces, du moins à court terme. Il convient donc d’examiner individuellement les risques écologiques associés à ces pratiques avant d’en autoriser l’application, afin de réduire les effets négatifs possibles. L’EES a permis de conclure que le présent programme sera clairement favorable à l’environnement et n’entraînera pas d’effets négatifs significatifs. Le lecteur devrait consulter plus particulièrement les sections suivantes du présent document : besoins de l’espèce; Objectifs en matière de population et de répartition; Stratégies et approches générales pour l’atteinte des objectifs.

Liste et description des diverses cotes de conservation attribuées au polygale incarnat aux États-Unis (d’après NatureServe, 2009).

Cote attribuée à l’échelle mondiale (cote G) Cote attribuée à l’échelle des États-Unis (cote N) Cote attribuée à l’échelle infranationale (cote S)
Polygale incarnat (Polygala incarnata) G5
(non en péril – espèce commune, répandue et abondante)
NNR
(non classée – espèce dont le statut de conservation n’a pas encore été évalué à l’échelle du pays ou des États)
Alabama (SNR)
Arkansas (SNR)
Caroline du Nord (S4)
Caroline du Sud (SNR)
Delaware (S1)
District de Columbia (SNR)
Floride (SNR)
Géorgie (SNR)
Illinois (S1)
Indiana (S1)
Iowa (S2)
Kansas (SNR)
Kentucky (S4)
Louisiane (SNR)
Maryland (S2S3)
Michigan (SX)
Mississippi (SNR)
Missouri (SNR)
Nebraska (SNR)
New Jersey (SH)
New York (SX)
Ohio (S2)
Oklahoma (SNR)
Pennsylvanie (SH)
Tennessee (SNR)
Texas (SNR)
Virginie (S4)
Wisconsin (S1)

S1 = gravement en péril; S2 = en péril; S3 = vulnérable; S4= apparemment non en péril; SNR = espèce non classée; SH = possiblement disparue; SX = vraisemblablement disparue.

Cette annexe a été retirée de la version du document publiée dans le Registre public.


[Notes]

[1] Espèce commune, répandue et abondante.

[2] Espèce dont le statut de conservation n’a pas encore été évalué à l’échelle du pays ou de l’État.

[3] Espèce extrêmement rare (souvent cinq occurrences ou moins) ou touchée par un déclin très marqué ou d’autres facteurs qui la rendent particulièrement susceptible de disparaître de la province.

[4] Espèce sauvage qui, de façon imminente, risque de disparaître du pays ou de la planète.

[5] Espèce qui vit à l’état sauvage en Ontario mais qui risque, de façon imminente, de disparaître de cette province ou de la planète.

[6] Recouverte d’une couche cireuse ou poudreuse de couleur bleutée.

[7] Inflorescence à croissance indéterminée où chaque fleur est reliée à l’axe central par un pédicelle.

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